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Quand la mémoire devient un fardeau
Publié en ligne le 25 mars 2022 – Information scientifique – Neurologie
Je veux savoir pourquoi je me souviens de tout. Je pense constamment au passé.
C’est comme un film qui ne s’arrête jamais. La plupart des gens pensent que c’est un don, mais pour moi c’est un fardeau. [1]
En 2000, Jill Price, une Américaine de 34 ans, née le 30 décembre 1965, écrivit aux neurobiologistes de l’université de Californie à Irvine (UCI). Son message s’adressait plus particulièrement à James McGaugh, neurobiologiste spécialisé dans le domaine de l’apprentissage et de la mémoire au Département de neurobiologie et de comportement de l’UCI et directeur fondateur du Center for the Neurobiology of Learning and Memory.
Jill Price décrivait avec précision son cas et demandait au chercheur de l’aider. Ses premiers souvenirs remontaient, comme pour la plupart d’entre nous, à sa petite enfance, mais à partir de ses onze ans, elle avait une incroyable capacité à se remémorer son passé et se souvenait de tous les jours de sa vie. Que ce soit au hasard d’une conversation, en lisant un journal, en regardant un calendrier ou si on lui donnait une date entre 1976 et le jour où elle écrivait, elle pouvait dire ce qu’elle avait fait ce jour-là. Si un événement très important avait eu lieu, comme par exemple l’explosion de Challenger le mardi 28 janvier 1986, elle pouvait le décrire. Elle se souvenait de ce qu’elle faisait le 4 octobre 1982, de ce qu’elle portait le 22 mai 1995, du jour où Bing Crosby est mort, le 14 octobre 1977. Elle pouvait voir chaque événement dans son esprit et le revivre, comme si elle regardait un film. Elle se souvenait sans effort de la première fois qu’elle avait entendu telle chanson ou rencontré telle personne. Elle disait que sa mémoire était « continuelle, incontrôlable et totalement épuisante ».
- Jupiter, déguisé en berger, séduit Mnémosyne, déesse de la Mémoire(détail), Jacob de Wit (1695-1754)
Quelques années plus tard, elle écrivit son histoire dans un livre, The woman who can’t forget [1] : « Mes souvenirs sont comme des scènes de films qui auraient été tournés sur ma vie, et qui seraient diffusées continuellement dans ma tête, projetant leur lumière en avant et en arrière sans relâche, m’emmenant vers n’importe quel moment du passé, sans que j’aie aucun contrôle sur ce phénomène. Imaginez que quelqu’un ait tourné des vidéos de vous à partir de votre enfance, en vous suivant tout au long de la journée, jour après jour, et qu’il les compile ensuite sur un DVD que vous regarderiez sur un lecteur, lequel vous passerait des extraits au hasard […] Je ne fais aucun effort pour faire affluer à moi ces fragments du passé. Ils se déversent simplement dans mon esprit. En fait, ils ne sont pas sous mon contrôle conscient, et même si j’aimerais les stopper un instant, je ne peux pas. »
Impressionné, J. McGaugh prit aussitôt très au sérieux l’appel à l’aide de Jill Price et lui répondit dans l’heure. Il consacrera les cinq années qui suivront à son cas. Au fil d’innombrables tests d’intelligence et de mémoire, il interrogera Jill Price sans relâche à propos de dates particulières du passé et publiera en 2006 un rapport [2] dans lequel il proposera le terme de « syndrome hyperthymétique », (du grec thymesis qui signifie souvenir et huper, avec excès), pour décrire ce premier cas de mémoire hors norme. Il différait des cas de mémoire supérieure qui utilisent des techniques mnémotechniques pour rappeler de grandes quantités d’informations.
L’hypermnésie et l’hyperthymésie
Selon Martial Van der Linden, professeur de psychologie à l’université de Genève et spécialiste de la mémoire, l’hypermnésie et l’hyperthymésie sont deux domaines différents de la mémoire extrême [3].
L’hypermnésie est le fait pour une personne de mémoriser intentionnellement n’importe quoi, des listes de mots, de chiffres, etc., en utilisant des procédés mnémotechniques très sophistiqués. L’écrivain britannique Daniel Tammet, atteint du syndrome d’Asperger, une forme d’autisme, est parvenu à 39 ans à réciter de tête 22 514 décimales du nombre pi. « Je les ai lues pendant trois mois » a-t-il confié, ajoutant que les nombres sont comme sa « langue natale » [4]. Kim Peek, dont le cerveau était endommagé depuis la naissance, a mémorisé plus de 7 600 livres [5]. Stephen Wiltshire, atteint d’autisme, a mémorisé le plan de Rome depuis les airs après un vol en hélicoptère de 45 minutes. Leslie Lemke, autiste, a joué à 14 ans le 1er Concerto pour piano de Tchaïkovski après l’avoir entendu une seule fois. Darold Treffert, psychiatre, ancien président de la Wisconsin Medical Society, raconte son histoire sur son blog du Scientific American. Il écrit : « Cette énorme mémoire musicale est remarquable, mais d’autant plus que Leslie est aveugle, ne sait pas lire la musique et n’a jamais eu de cours de musique de sa vie » [6]. Ces types de mémoire dite savante sont des manifestations de la mémoire « automatique » ou « d’habitude ».
- Le Penseur ou Faune en méditation, Jacob Jordaens (1593-1678)
L’hyperthymésie concerne un petit nombre de personnes identifiées depuis une vingtaine d’années, qui ont une capacité exceptionnelle, indépendante de leur volonté, à récupérer des souvenirs autobiographiques. À partir d’une date, elles rappellent automatiquement un souvenir autobiographique et inversement, si on leur propose un souvenir, elles sont capables de le dater avec précision. Les hyperthymétiques récupèrent aussi bien les souvenirs des événements personnellement vécus que des événements publics, qui ont eu une résonance particulière pour eux. Jill Price ne se remémore les choses qu’en remontant jusqu’à 1976. Sa mémoire autobiographique fonctionne depuis cette date d’une manière mystérieuse. Dans des épreuves comme celle de la reconnaissance de mots, elle est capable d’identifier sans hésiter cinquante termes mélangés à d’autres, qu’elle a précédemment aperçus. Mais dans des tâches comme celle consistant à apprendre des listes de mots et les restituer librement, ses performances sont en dessous de la moyenne. Selon le rapport de J. McGaugh, son intelligence est moyenne, de même que sa capacité d’abstraction. En effet, elle a du mal à prévoir et à planifier l’avenir, à réfléchir de manière symbolique et à tirer des conclusions. Elle dit qu’à l’école, elle ne réussissait qu’en travaillant beaucoup et qu’elle avait du mal à retenir les poésies et les dates en histoire. Elle confie qu’elle perd souvent ses clés et qu’elle doit noter beaucoup de choses pour ne pas les oublier.
Salomon Veniaminovitch Cherechevski, hypermnésique et synesthète
L’intérêt pour l’étude scientifique de la mémoire extrême prend sa source dans l’histoire surprenante de Salomon Veniaminovitch Cherechevski, un journaliste russe ayant vécu au début du XXᵉ siècle. Son cas fut étudié pendant près de trente ans par le neuropsychologue russe, Alexandre Luria (1902-1977), spécialisé dans l’étude des mécanismes de la mémoire en lien avec le langage. Il l’appela « Veniamin » et raconta son histoire dans Une prodigieuse mémoire [7].
S. V. Cherechevski était âgé de trente ans quand il vint consulter A. Luria. Hypermnésique et synesthète, il était capable de ressentir des impressions visuelles en écoutant des sons et vice versa : « Un coup de sonnette fait naître une image visuelle spontanée ; elle possède des qualités tactiles, une couleur, un goût. Ces synesthésies reviennent dans toutes les sensations et impressions du monde extérieur. » La synesthésie, phénomène neurologique non pathologique par lequel deux ou plusieurs sens sont associés sous forme d’images visuelles, se manifestait chaque fois qu’on lui donnait à entendre certains sons : « Lorsqu’il entendait ou lisait un mot, celui-ci se transformait aussitôt en une représentation visuelle de l’objet correspondant. » Il s’appuyait sur cette capacité pour mémoriser des quantités colossales d’informations. A. Luria écrit : « La mémoire de Veniamin n’avait pas de limites définies, ni dans son étendue ni dans sa constance. Il était capable de reproduire sans erreur ni effort apparent n’importe quelle liste de mots qui lui avait été donnée une semaine, un mois, et même une ou plusieurs années plus tôt. Certaines de ses expériences, toujours couronnées de succès, avaient eu lieu quinze ou seize ans après une première mémorisation de la liste et sans aucune préparation. Veniamin s’asseyait, fermait les yeux, se taisait quelques instants, puis disait : “Oui, c’est bien ça… c’était dans votre ancien appartement, vous étiez assis devant la table et moi dans un fauteuil à bascule… vous portiez un complet gris et vous me regardiez comme ça… voilà, je vois ce que vous me disiez…”, et ensuite il énumérait sans la moindre erreur tous les éléments de la liste qui lui avait été donnée quelques années plus tôt. » Devenu un « mnémoniste » professionnel célèbre, il lui fallait se souvenir de centaines et de milliers de listes. Il n’existait pas chez lui de frontière nette entre la vue et l’ouïe, entre le toucher ou le goût. Le procédé mnémotechnique qu’il utilisait le plus fréquemment consistait à aligner mentalement les images des mots, le plus souvent le long d’une route connue, soit une rue de sa ville natale, soit une rue de Moscou comme la rue Gorki : « Il la descendait lentement et “disposait” les images devant les maisons, les portes cochères ou les vitrines des magasins, puis sans savoir comment, il se trouvait de nouveau dans son Torjok natal et terminait la promenade devant la maison de son enfance… »
- La Leçon difficile, William Bouguereau (1825-1905)
L’assimilation d’un texte lui était très pénible étant donné le flot d’images qui le submergeait. La lecture de la poésie était quasiment impossible, parce qu’elle déclenchait un conflit entre les images du texte et les siennes. La pensée abstraite lui était inaccessible : « Il ne peut pas comprendre s’il ne voit pas et s’efforce de voir rien et de trouver la forme de l’infini. » S. V. Cherechevski dit : « Je ne comprends que ce que je vois… » C’est pourquoi il dit penser intensément au « rien » et à l’« infini » jusqu’à leur trouver un contenu visuel qui lui permette de les comprendre. Incapable d’oublier, il luttera toute sa vie contre sa mémoire infernale. Il mit au point des techniques, comme celle d’écrire sur des bouts de papier ce qu’il voulait oublier. Mais il n’y réussit pas à tous les coups. Il alla jusqu’à brûler ces papiers afin de faire disparaître la chose avec la trace. Finalement, il découvrit que le plus efficace, c’était encore de décider d’oublier. Mais l’effort de volonté nécessaire l’épuisa.
Le dernier chapitre du livre de A. Luria s’achève par « Quelques mots sur l’avenir ». Il constate que la psychologie n’est pas encore devenue une « véritable science de la personnalité humaine ». Pour accéder à la psychologie scientifique de la personnalité, il faut, dit-il, « suivre beaucoup de pistes tortueuses et gravir maints sentiers abrupts ». C’est ce que lui offrit l’histoire de S. V. Cherechevski.
Jill Price, hyperthymétique
Jill Price fut la première personne à recevoir le diagnostic de Highly Superior Autobiographical Memory (HSAM), ou « mémoire autobiographique hautement supérieure », et à inspirer les recherches sur le « syndrome hyperthymétique », différent de l’hypermnésie. C’est à partir de ce cas que les neuroscientifiques de l’UCI, J. McGaugh et L. Cahill, ont commencé à étudier les personnes ayant ce type de mémoire prodigieuse.
Ils donnèrent le pseudonyme « AJ » à celle dont ils dévoileront quelques années plus tard la véritable identité. Dans leur rapport de recherche cité plus haut, ils constatèrent qu’il existe une abondante littérature sur les patients atteints de syndromes amnésiques, qui a enrichi la compréhension des échecs de la mémoire et des régions cérébrales impliquées. En comparaison, la recherche sur les formes de mémoire extrême est encore balbutiante du fait du petit nombre de personnes concernées. Au terme de leur première étude, ils ont conclu que le travail avec AJ avait démontré l’importance non seulement d’explorer sa mémoire telle qu’elle la décrivait, mais aussi d’examiner la mémoire dans le contexte plus large d’autres domaines neuropsychologiques [2].
Afin de confirmer l’exactitude des réponses de Jill Price, ils se sont référés à l’enregistrement des événements publics importants. J. McGaugh et son équipe ont pu comparer les récits de ses expériences personnelles à un journal qu’elle a tenu au jour le jour de 10 à 34 ans. Sa mère a vérifié certains de ses souvenirs. Dans les rares occasions où elle ne se souvenait pas d’un événement, elle disait simplement qu’elle ne s’en souvenait pas. Les chercheurs lui ont fait passer de nombreux tests psychologiques standardisés qui évaluent diverses capacités mentales. Ils lui ont demandé de se souvenir d’informations ou significatives ou dénuées de sens, de données visuelles et de choses qu’elle avait dites ou non. Elle a bien réussi et selon les chercheurs : « Dans certains cas, elle était parfaite. » D’ailleurs, dans les tests où Jill Price réussissait brillamment, un effet plafond est vite apparu, les épreuves étant trop faciles pour elle. Elle les a réussies sans atteindre ses limites et a souvent obtenu un score parfait. McGaugh a supposé que ses capacités étaient probablement dues à un développement anormal de son cerveau.
En 2009, l’équipe de J. McGaugh a lancé un appel pour encourager les personnes qui pensaient avoir cette capacité de mémoire extraordinaire à les contacter pour une éventuelle inclusion dans l’étude scientifique. À celles qui répondaient, ils demandaient si elles pensaient que leur mémoire était similaire à ce qui était décrit et dans l’affirmative d’envoyer un message à l’UCI avec leur numéro de téléphone afin d’être contactées et éventuellement retenues pour l’étude. Ils soulignaient que la mémoire est importante à comprendre, car c’est notre capacité la plus précieuse. Si nous perdons nos souvenirs, nous perdons notre individualité. Les sujets retenus avaient la même capacité à citer le jour de la semaine pour n’importe quelle date donnée, à dire ce qu’ils avaient fait et à parler d’événements publics qui s’étaient produits ce jour-là. Les chercheurs avaient également des informations personnelles sur chacun d’entre eux : « Nous avons identifié une cinquantaine de cas similaires. Ils se souviennent des événements de leur vie personnelle beaucoup mieux que nous, mais ils ne sont pas meilleurs que la moyenne en histoire, par exemple, ni aux tests qui exigent de retenir une liste de mots. »
En 2016, une étude menée par l’équipe d’Aurora LePort de l’UCI précise que « l’étude des individus qui ont des souvenirs forts et durables d’expériences quotidiennes ordinaires offre une nouvelle perspective à partir de laquelle étudier l’encodage, le stockage et la récupération de la mémoire ». Ces individus se caractérisent par l’impossibilité d’oublier et par la capacité de préserver une richesse remarquable de détails concernant les événements autobiographiques. Les auteurs ajoutent : « Bien que les personnes atteintes de HSAM aient une mémoire détaillée d’événements autobiographiques antérieurs, le taux d’oubli ainsi que la qualité et la quantité de ces souvenirs n’ont pas été étudiés auparavant de manière suffisamment détaillée » [8].
Selon M. Van der Linden, on ne sait pas encore si c’est parce qu’ils ont des structures cérébrales particulières que les hyperthymétiques ont une mémoire autobiographique prodigieuse ou si c’est leur mémoire autobiographique prodigieuse qui a entraîné des changements dans les régions cérébrales. La mémoire autobiographique implique un large réseau neuronal. Un souvenir autobiographique ne se situe pas dans un endroit particulier du cerveau, mais il est distribué dans toute une série de régions cérébrales, les régions du lobe temporal, certaines régions hippocampiques, certaines régions de l’insula. On ne connaît pas encore le rôle précis de ces différentes régions dans la production des souvenirs autobiographiques extrêmes [3].
La mémoire des hypermnésiques et des hyperthymétiques est-elle exempte de faux souvenirs ?
Les personnes ayant des capacités de mémoire hautement supérieure sont-elles vulnérables aux mêmes types de distorsions et d’erreurs que les autres, ou leurs capacités les protègent-elles d’une manière ou d’une autre des influences suggestives ?
En 2013 et 2015, deux études conduites par Lawrence Patihis, spécialiste des distorsions de la mémoire et des faux souvenirs à l’université de Portsmouth (Grande-Bretagne) puis à l’UCI, se sont intéressées plus particulièrement aux personnes récemment identifiées dotées d’une HSAM, dont les souvenirs reviennent automatiquement et continuellement, envahissant leur présent, sans qu’elles utilisent, comme l’hypermnésique S. V. Cherechevski, des procédés mnémotechniques particuliers [9, 10]. L. Patihis justifie ainsi ce choix : la HSAM « est une capacité récemment identifiée qui a été difficile à expliquer avec la science de la mémoire existante ». Les études concluent que les hyperthymétiques peuvent aussi avoir de faux souvenirs et leur mémoire peut être manipulée, ce qui en fait une mémoire « normale » à cet égard, suggestible, malléable et susceptible d’intégrer des « souvenirs » d’événements fictifs.
Les chercheurs ont utilisé un matériel composé de vingt listes de mots liés entre eux par associations d’idées selon le paradigme expérimental DRM (Deese-Roediger et McDermott). Les participants voient ou entendent des listes de mots (par exemple soleil, citron, canari, or, tournesol, jonquille, paille, œuf, etc.) associés à un mot-thème non présenté (ici, jaune) désigné par le terme de « leurre critique ». Lorsqu’on demande ensuite aux participants de reconnaître les mots présentés parmi des leurres, les sujets reconnaissent à plus de 50 % avoir étudié le mot-thème alors qu’il n’a jamais été vu, révélant ainsi le phénomène de fausse reconnaissance associative. Ces épreuves se sont déroulées en deux sessions espacées d’une semaine avec vingt personnes possédant une mémoire exceptionnelle et trente-huit témoins appariés selon l’âge et le sexe. Les auteurs précisent : « Les matériaux du paradigme de la désinformation ont été présentés sous forme de diaporamas photographiques, de textes narratifs avec quelques éléments trompeurs, et de tests de mémoire et de source. »
Les personnes hyperthymétiques se sont montrées aussi sensibles à une fausse mémoire que les témoins. Elles reconstruisent leurs souvenirs en utilisant le groupement associatif, comme cela a été démontré par une tâche de liste de mots, en incorporant des informations d’événements postérieurs, comme le montrent les tâches de désinformation. Les résultats suggèrent également que les mécanismes de mémoire reconstructive qui produisent des distorsions de la mémoire sont basiques et répandus chez les humains, et qu’il est peu probable que quiconque soit immunisé [9, 10].
À l’égal de Jill Price, les autres personnes dotées d’une HSAM disent que c’est un fardeau de ne pouvoir faire de tri entre les souvenirs, les bons et les mauvais. Dans son essence, la mémoire est sélective et reconstructive. Nous la modifions pour que les souvenirs soient en phase avec notre identité jusqu’à la parsemer de faux souvenirs ; les hyperthymétiques n’y échappent pas. Loin d’être ordonnée comme une bibliothèque, la mémoire ressemble plus à un capharnaüm, ses ressources pour nous jouer des tours sont inépuisables !
1 | Price J, The woman who can’t forget, Free Press, 2008.
2 | Parker ES et al., “A Case of Unusual Autobiographical Remembering”, Neurocase, 2006, 12 :35-49.
3 | Planète Santé, « Les secrets de la mémoire : l’hypermnésie », 2016. Sur planetesante.ch
4 | Tammet D, Embrasser le ciel immense : le cerveau des génies, Les Arènes, 2009.
5 | Morin H, « Les hypermnésiques, ces athlètes de la mémoire », Le Monde, 23 mai 2019. Sur lemonde.fr
6 | Treffert D, “Whatever Happened to Leslie Lemke ?”, Scientific American, 17 juin 2014. Sur scientificamerican.com
7 | Luria A, L’homme dont le monde volait en éclats, Seuil, 1995, suivi de : Une prodigieuse mémoire, Seuil, 1970.
8 | LePort A et al.,“Highly Superior Autobiographical Memory : Quality and Quantity of Retention Over Time”, Frontiers in Psychology, 2016, 6 :2017.
9 | Patihis L et al., “False memories in highly superior autobiographical memory individuals”, PNAS, 2013, 110 :20947-52.
10 | Patihis L, “Individual differences and correlates of highly superior autobiographical memory”, Memory, 2015.