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par Brigitte Axelrad – SPS n° 288, octobre 2009
L’Express1 vient de consacrer, en juin 2009, plusieurs articles au packing, méthode d’enveloppements froids prétendue traiter les troubles liés à l’autisme. De l’anglais to pack,emballer, cette méthode pratiquée en particulier par Pierre Delion2, responsable d’un service de psychiatrie infanto-juvénile à Lille, consiste à emmailloter l’enfant jusqu’au cou dans un cocon de contention mouillé et glacé, (au moins 10° en dessous de la température du corps), pendant 45 minutes sous la surveillance de deux psychomotriciennes.
Rapidement la température de sa peau chute de 36 à 33 degrés. L’enfant très agité au départ est saisi par le froid et progressivement réchauffé, il devient plus calme (!) à la grande satisfaction du personnel soignant. Ceci se renouvelle jusqu’à sept fois par semaine. Le packing n’est pas remis en question en tant que tel par les autorités sanitaires, qui sont plus préoccupées par les pratiques aberrantes auxquelles il donne lieu ici et là, telles que l’utilisation de serviettes congelées, la durée interminable des séances, des parents avertis seulement après coup…
Des associations, telles que Léa pour Samy, luttent contre cette pratique barbare qu’elles rapprochent de la camisole de force utilisée jadis pour ceux qu’on appelait les fous. Au Canada, un enfant autiste de neuf ans est mort étouffé après avoir été enroulé de la tête aux pieds dans une couverture thérapeutique de 17,5 kilos. L’enfant pesait 24 kilos. Il avait été placé sur le ventre, les bras le long du corps, et enroulé le visage couvert dans la lourde couverture. On avait fait quatre tours pour le contenir.3.
Le packing vient des États-Unis, où il est quasiment abandonné. C’est un psychiatre américain M. A. Woodbury qui a développé cette technique en France dans les années 60/70. Il s’est enraciné dans le terreau psychanalytique français. La thérapie est individuelle, chaque enfant ayant, selon le jargon psychanalytique, un groupe de référents soignants appelé la « constellation transférentielle », qui se réunit régulièrement pour travailler le « contre transfert ». Le professeur Pierre Delion utilise le langage symbolique et hermétique de la psychanalyse pour justifier le sens de cette thérapie : « L’enveloppement vise à rassembler le corps du jeune autiste, qui manque de contenance. Il s’agit de lui procurer un sentiment sécurisant d’unité, au lieu de la sensation angoissante d’être en plusieurs morceaux ».4 N’est-on pas ici dans une logique du non-sens ?
Ceux qui croiraient qu’enfin en France la conception psychanalytique de l’autisme a fait son temps sont loin de la vérité. Si les causes de l’autisme ne sont pas encore totalement identifiées, on sait cependant qu’elle a une composante génétique.5 Quelles que soient ses causes, à quoi rime de traiter ces enfants avec des méthodes violentes et d’un autre âge fondées sur de tels présupposés pseudoscientifiques ? M’Hammed Sajidi, président de Léa pour Samy, s’indigne6 :« Jusqu’à quand va-t-on traiter les autistes comme des fous en France, alors que le reste du monde les reconnaît comme des personnes handicapées ayant besoin d’une éducation adaptée ? »
La réponse à cette question sera peut-être en partie apportée dans trois ans par les conclusions de l’essai clinique lancé dernièrement par le Ministère de la Santé, si « l’ignorance agissante, qui fit tant de mal à des générations de familles », (Jacques Bénesteau7), en d’autres termes la psychanalyse, ne la freine pas encore. Bien long pour ceux qui sont concernés !
1 L’Express. Un diaporama montre comment l’équipe soignante « emballe » un enfant autiste au CHRU de Lille.
2 Pierre Delion a collaboré avec Elisabeth Roudinesco à la réponse au Livre Noir de la psychanalyse : Pourquoi tant de haine, anatomie du Livre noir de la psychanalyse, Navarin éditeur, 2005. Auteur de Le Packing… Érès, novembre 2003. Voir Les arguments des détracteurs du « Livre noir de la psychanalyse », SPS n° 271.
3 Paperblog, Magazine handicap, 23 juin 2008.
4 Citation des propos du Pr Pierre Delion par Estelle Saget dans son article « Autisme, le traitement qui choque »L’Express n° 3024, 18 au 24 juin 2009.
5 « L’autisme : un pas de plus vers sa connaissance », Science et pseudo-sciences n° 286.
6 L’Express, article cité plus haut.
7 Jacques Bénesteau, Mensonges Freudiens, 2002, Mardaga.